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Definitely British, Absolutely American!

Manuel de civilisation britannique et américaine

 

Sous la direction de Fabien Fichaux

 

Collection Optimum

Paris : Ellipses, 2011 (2e édition)

Broché. 456 pages. ISBN 978-2729866754. 30,50 €

 

Recension d’Emmanuel Roudaut

Institut d’études politiques de Lille

 

 

Cet ouvrage collectif, destiné aux lycéens et aux étudiants non spécialistes, est un manuel de référence pour préparer les épreuves écrites et orales d’anglais à l’entrée d’HEC, des IEP, de l’ENA et des ESJ. Le propos, à la fois modeste et ambitieux, est clairement présenté en quatrième de couverture : « approfondir ses connaissances de civilisation américaine et britannique, à travers un panorama de la politique, de la société et de l’économie du monde anglo-saxon ». Le programme est vaste, mais il s’agit ici simplement d’en donner un aperçu à travers des résumés de cours assortis d’aides lexicales, de fiches synthétiques, et de quelques modèles de réponses à des questions ou sujets d’essais tirés des annales de concours.

Comme l’indique le titre, l’ouvrage est constitué de deux volets d’importance comparable. Le premier est consacré à la civilisation britannique, le second à la civilisation américaine. Si les deux chapitres d’ouverture, « Introduction to Britain » et « Introduction to the United States », donnent lieu à des rétrospectives historiques, de Jules César et du Mayflower à nos jours, l’approche est résolument thématique et privilégie les vingtième et vingt-et-unième siècles, avec plus de rappels historiques dans le volet américain.

Les thèmes abordés (46 en tout) recouvrent aussi bien les aspects institutionnels (The Monarchy, The Constitution of the United States) que politiques (Blair’s Third Way, A Coalition Government, The US as Global Policeman, The September 11 Attacks), religieux, sociaux, sociétaux (Feminism in Great Britain, Gay and Lesbians in the UK, Political Correctness), économiques (From New Economy to Subprime Crash) et culturels (British Cinema, Hollywood and the Entertainment Industry). La présence de renvois, notamment dans la partie consacrée aux États-Unis, est bienvenue car la structure de l’ouvrage se prête à une lecture par prélèvement, sans ordre pré-établi. Il serait judicieux d’en faire autant pour la partie britannique dans une prochaine édition.

Le souci premier est celui de la concision et de l’efficacité pédagogique. On en mesure mieux l’intérêt dans les domaines dont on est moins familier. Ainsi, n’étant pas spécialiste des États-Unis, l’auteur de ces lignes a apprécié d’apprendre à quel point la Guerre de sécession avait modifié les pratiques en matière de port d’armes, pour ne donner qu’un exemple [353]. Certains dossiers thématiques sont complétés par de courtes annexes très utiles pour les étudiants (tableaux chronologiques, documents fondateurs comme la déclaration d’indépendance [241] ou le Bill of Rights [242], nombreux encadrés présentant des mesures législatives ou le rôle de certaines organisations).

On peut toutefois regretter le traitement trop sommaire de certains points, notamment le double référendum de 1979 sur la dévolution au pays de Galles et en Écosse. Une ou deux phrases d’explication, ainsi qu’un renvoi entre les pages 95 et 99, auraient aidé l’étudiant à s’y retrouver. Il en va de même pour « Obama care » [384-385], dont les dispositions sont évoquées en une courte phrase. L’essentiel du commentaire est consacré aux pressions du lobby pharmaceutique, et l’absence de tout renvoi confirme que le fond du débat est supposé connu. Ce choix ne gênera pas le lecteur universitaire, il se justifie moins dans un ouvrage d’initiation où l’on attendrait un éclairage plus substantiel. Il en va de même pour l’année 1607, qualifiée à juste titre de « jalon important » dans l’histoire des États-Unis [289]. On cherche en vain la moindre explication, y compris dans la chronologie générale [228]. Ces lacunes sont mineures, et elles sont largement compensées par la clarté du traitement d’autres points, comme celui du programme TANF (Temporary Assistance to Needy Families [379-380]).

L’objection est plus sérieuse lorsque la relation entre le Royaume-Uni et l’Europe est abordée [43-45]. Alors que Wilson et Macmillan sont nommés l’un et l’autre, aucune mention n’est faite d’Edward Heath (tout juste est-il question du « nouveau gouvernement conservateur issu des élections de 1970 »). Margaret Thatcher est absente de ce chapitre, où l’on passe presque sans transition du référendum de 1975 à l’action de Tony Blair. La montée de l’euroscepticisme au sein du Parti conservateur est très largement éludée, hormis un paragraphe très sibyllin [45] qui pourrait faire croire aux jeunes lecteurs que les dissensions sont apparues sous la direction de David Cameron. Certes, ce point est rapidement évoqué à un autre endroit de l’ouvrage [60 et 64], mais cela n’est pas signalé par un renvoi. Ajoutons qu’une brève mention de l’essor de UKIP serait la bienvenue dans une prochaine édition.

Certains chapitres gagneraient à une plus grande prise de recul. Était-il nécessaire, dans le chapitre consacré à l’enseignement au Royaume-Uni, de présenter les public schools comme « great British traditions … [that] work their magic through better exam results » [115] ? La phrase suivante n’est-elle pas réductrice : « Tony Blair inherited a golden legacy from the Conservative governments of Margaret Thatcher and John Major, but the Labour party left the country in a state of economic decline after thirteen years of rule. [14] » ? Si l’on peut comprendre qu’un ouvrage publié en 2011 choisisse d’insister sur les annonces d’un gouvernement récemment nommé plutôt que d’esquisser un bilan, on constate un manque de distance critique à l’égard de la nouvelle équipe, comme l’illustrent, entre autres, les conclusions contrastées de trois passages consacrés à Ed Miliband, Tony Blair et David Cameron [respectivement 72, 74 et 212]. Enfin, fallait-il vraiment conclure le chapitre sur la dévolution, après une présentation du SNP et de Plaid Cymru, par celle de la Big Society, qualifiée de « biggest redistribution from elites in Whitehall to the local communities [100] » ? Si l’on choisissait de terminer ainsi par l’Angleterre, n’eût-il pas été utile d’évoquer certaines tensions entre pouvoir central et pouvoir local dans les décennies précédentes ?

Quelques ouvrages sont parfois mentionnés dans le corps du texte, c’est notamment le cas des classiques du féminisme publiés après 1945 [193], mais des orientations bibliographiques plus fournies auraient été les bienvenues, au moins en fin d’ouvrage à défaut de figurer systématiquement en fin de chapitre.

Les réserves exprimées ci-dessus ne sauraient occulter les nombreuses qualités de ce travail. La diversité des thèmes abordés est une richesse à laquelle on ne peut rendre justice en quelques lignes. Signalons simplement que, loin de se cantonner aux grandes questions traditionnelles, l’ouvrage emprunte quelques sentiers moins fréquentés. On croisera ainsi Lewis Caroll, Edward Lear et Spike Milligan au chapitre « The Eccentric – an English Beast ? » [131-138]. Un document publié au XVIIIe siècle, The Female Husband, sert de point de départ à un essai sur la question gay. Le chapitre consacré aux lieux de mémoire américains [423-430] permet une autre approche de thèmes abordés par ailleurs.

Les erreurs factuelles, inévitables, sont rares. Pratique et pédagogique, cet ouvrage constitue un outil précieux, non seulement pour les candidats aux concours, mais aussi pour les étudiants de premier cycle, qui y trouveront l’essentiel de ce qu’il faut connaître. Il ne se limite pas pour autant à un simple compendium de faits et dates. Le traitement des grands thèmes donne lieu à de fructueuses mises en tension (entre l’affirmative action et la tradition du self-made man ; ou sur la place de la religion dans la société américaine ; ou encore sur le port d’armes, pour ne donner que quelques exemples) qui alimenteront la réflexion du lecteur.

 

Cercles © 2013

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