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La recherche Internet en lettres et langues

Claire Larsonneur

Avec la participation de Julie Hirsch, Géraldine Galeote,

Laura Fournier, Adelaide Cristovaõ et Diane Marshall

 

Paris : Éditions Ophrys, 2008

174 p. ISBN 978-2-7080-1204-2

 

Recension d'Hervé Thily

Université de Rouen, IUFM de Haute-Normandie

 

Maître de Conférences en littérature et traduction (11e section du CNU), Claire Larsonneur enseigne dans le cadre du master T3L à l’Université Paris VIII. Elle a publié en 2005 Les Mots du territoire chez Dexia éditions.

L’introduction de l’auteur expose la stratégie adoptée pour aborder l’examen des ressources disponibles sur Internet, à la fois pour une large palette d’utilisateurs comme pour une variété d’objectifs à atteindre. Sont ainsi ciblés par cet ouvrage les étudiants (lettres et langues), convaincus à juste titre des potentialités de cet outil d’information, ainsi que les enseignants qui, dans les mêmes disciplines, sont davantage motivés par des critères rigoureux et des objectifs plus spécifiques. L’auteur invoque également la volonté compréhensible d’embrasser dans son ouvrage une multiplicité de langues de l’Union Européenne pour respecter le caractère multilingue de cet espace d’information et de communication. En fin d’ouvrage, cette dimension polyglotte est ainsi exposée dans six « coups de cœur » successifs, appelant tour à tour des collègues linguistes à indiquer les ressources utilisables dans diverses langues de l’Union Européenne. Julie Hirsch expose ainsi les ressources pour les germanistes [127-130], Géraldine Galeote sélectionne pour l’espagnol [131-135] les sites incontournables. Le volet sur la langue française est assuré par Claire Larsonneur elle-même [137-141] puis Laura Fournier recense pour l’italien les sites-référence [143-147] et les sites lusophones sont sélectionnés par Adelaide Cristovaõ [149-153] et, pour terminer, le monde anglophone est couvert par Diane Marshall [155-158].

L’ouvrage, qui est présenté comme un guide pratique, est construit autour de huit chapitres et leurs suppléments (dont quatre boîtes à outils et six « coups de cœur » mettant les projecteurs sur  autant de langues de l’Union Européenne). Cet objectif, multilingue et multipublics, pourrait paraître trop ambitieux pour atteindre tous ses objectifs. Claire Larsonneur parvient cependant à fédérer toutes les attentes en prenant le parti de décloisonner les disciplines et de mettre en lumière les approches et techniques communes pour une recherche d'informations réussie. Tout dans cet ouvrage est fait pour aider à une lecture rapide, sélective, guidant le lecteur au gré de ses besoins et selon divers critères : règles à respecter, principaux écueils, astuces de recherche et études de cas. L'emploi de pictogrammes permet instantanément, à l’image de la navigation sur la toile, d’identifier les pages à lire prioritairement pour répondre aux premières urgences du lecteur. Ainsi, au gré de lectures successives et parcellaires, celui-ci saura aisément repérer les constantes parmi les diverses richesses et langues offertes sur la toile, s’appropriant ainsi la règle d’or de l’internaute, exposée sous son acronyme [9] : DRDV pour « débrouillardise, rigueur, doute et vérification ». Dans son ensemble, l’ouvrage se lit avant tout comme un guide pratique, avec rapidité et plaisir et s’inscrit dans une stratégie multi- et transdisciplinaire, ouvrant ainsi au lecteur, souvent motivé par des recherches dans un seul champ disciplinaire, une salutaire incursion dans des domaines où il ne se serait pas aventuré délibérément. En cela, l’ouvrage est très instructif et sait fédérer les stratégies les plus diverses dans l’examen et le partage de pratiques efficaces, fiables et rapides.

Le lecteur est immédiatement confronté dans le préambule à l'examen des causes d’une désillusion attendant la plupart des requêtes effectuées. « Les écueils les plus fréquents » [10-12] recensent les cinq effets identifiés par Claire Larsonneur, à savoir :

-L’effet de « saturation »

-L’effet de « lissage »

-L’effet d’« œillère »

-L’effet de « labyrinthe »

-L’effet de « sables mouvants » et

-L’effet de « capteur de temps ».

Ce rappel n’est pas superflu, que ce soit pour les internautes pressés d’arriver à leurs fins ou ceux sous-estimant la difficulté d’obtenir des recherches pertinentes avec quelque moteur que ce soit.

Ce cadre étant posé, les huit chapitres vont se succéder, dans une sophistication d’emplois croissante. Le maniement des moteurs de recherche est l’objet du premier chapitre. L'emploi de Google, maintenant encore plus solidement établi en première position des moteurs de recherche, ouvre le chapitre. L’auteur en retrace l’historique [16] et souligne trois dangers inhérents à cette position dominante. L’actualité récente montre le bien-fondé des appréhensions exprimées par Claire Larsonneur : la censure (ou la tentation de censure) opérée par certains pays, la confidentialité des données menacée par des visées commerciales et politiques et, enfin, la question des droits d’auteur dans le référencement des publications en ligne et la publication par ce moteur derecherche des ouvrages tombés dans le domaine public.

Vient ensuite une série de conseils [17-18] pour optimiser le recours aux moteurs de recherche, illustrés par des exemples clairs et convaincants et où les captures de pages-écran placent le lecteur dans un environnement familier. Si certains lecteurs n’apprendront que peu de choses dans la mise en œuvre de requêtes et la lecture des résultats, il est cependant intéressant d’apprendre les critères de classement des données et leur disposition sur la page-écran. L’auteur accompagne ces informations de liens vers divers sites (CERISE et REPERE). Comme on pouvait l'imaginer, la pérennité des liens est limitée et le premier site indiqué n’est plus accessible désormais à l’adresse indiquée. Exalead est justement mentionné page 18 pour son efficacité et l’auteur se limitera à ce choix (excellent) dans les études de cas qui ponctuent l’ensemble l’ouvrage. Si les requêtes parviennent aisément à convaincre le lecteur de l’efficacité de recherches pertinentes, on peut regretter la petite taille des pages-écran reproduites dans cette partie de l’ouvrage [19 & seq.], ce qui rend leurlecture difficile.

Tributaire du format de la publication, l’argumentation de Claire Larsonneur en souffre quelque peu. L’optimisation de la configuration en langues du moteur de recherche [22-25] paraîtra plus satisfaisante pour la recherche documentaire multilingue que pour les linguistes chevronnés spécialistes de leurs domaines mais la lecture de ces pages donne un éclairage nouveau sur des pratiques aussi utilisées que méconnues des internautes. Les étudiants trop pressés liront avec profit les conseils de l’auteur quant à la gamme des approches possibles (par relevé de termes associés, par ciblage linguistique, par pays, dont certains ont adopté un bilinguisme officiel). La formulation des requêtes [26-27] et le croisement des sources [27-30] reprennent le schéma maintenant bien connu, à savoir, prescriptions pour l’utilisateur, écueils éventuels et études de cas (la première en allemand et la seconde en français). L’auteur tire elle-même les leçons des pratiques mises en œuvre.

Le chapitre 2, intitulé « la fausse transparence d’Internet » cible des notions fondamentales pour les internautes. Claire Larsonneur vise tout particulièrement :

-La prise de conscience des risques

-La redécouverte de la notion d’autorité

-La différence entre copie, plagiat et citation et, enfin

-Comment appréhender le Web invisible.

Cette douzaine de pages expose très clairement au travers d'exemples divers la nécessité de rigueur et de lucidité pour les internautes. Leur lecture est particulièrement éclairante pour les étudiants, qui verront de façon très convaincante les erreurs à ne pas commettre pour rechercher, valider et exploiter une information fiable. Les pages 38 et 39 sont particulièrement judicieuses, même pour des internautes chevronnés par la description de l’application pratique du précepte « Trouver, c'est bien, savoir retrouver, c'est mieux ! ». La disposition de la feuille de route et l’exemple illustré dans celle-ci [39] emportent l’adhésion de l’internaute par le gain de temps qu'apporte la stratégie préconisée par C.Larsonneur.

Les deux pages qui traitent du web invisible (également appelé Hidden Web ou Deep Web, comme le rappelle l’auteur) soulignent de façon concise la relativité des recherches opérées par tout moteur de recherche généraliste. Si on peut contester en 2010 le pourcentage de 3 à 10 % donné par C. Larsonneur quant au pourcentage de données effectivement traité dans le web « surfacique », il reste vrai que l’essentiel des données en ligne n’est toujours pas correctement indexé et c’est donc à juste titre que le recours aux métamoteurs et aux agents intelligents [42] s’impose. Parmi ces derniers, Copernic est recommandé, ainsi que Strategic Finder pour opérer une veille stratégique.

Dans le Chapitre 3, les pages 43 à 62 traitent du tri et de l'évaluation des données recueillies. A partir d’exemples très pertinents, C. Larsonneur analyse rapidement mais avec efficacité les sites visités. Le lecteur trouve dans ces pages des conseils illustrés vraiment convaincants, qu’il fera siens dans sa future navigation (… comme dans la construction d’un blog correctement utilisé). La lecture exhaustive et la prise en compte des « points de vigilance » |52-]53, comme la technique du « tri avec discernement » [54-55] donnent l'essentiel des pratiques à mettre en œuvre pour opérer une première sélection rapide mais fondée entre des données douteuses et des informations à priori plus fiables. Les quatre exemples donnés page 55 (en diverses langues) sur des sujets très divers apportent aux arguments développés précédemment une justification immédiate. Les études de cas dans les quatre pages suivantes étendent encore les travaux pratiques en intégrant les pages-écran (là encore difficilement exploitables en raison de leur format, mais les commentaires de l’auteur viennent atténuer ce défaut). Le sous-chapitre 3.4., « Évaluer avant d’utiliser » survole en trois pages [60-62] des identifications plus fines, mais tout aussi indispensables (auteur et date, objectif du message et raison d’être du site et de ses contenus). Une étude de cas [61], illustrée d’une page-écran, permet de comprendre le bien-fondé des commentaires de l'auteur qui propose page suivante, une série d’activités à mener, selon la formule maintenant familière au lecteur.

Le chapitre 4 et ses recherches lexicales intéresseront plus directement les linguistes engagés dans la terminologie et/ou la lexicologie. L’auteur y traite successivement (sous-chapitre 4.1, pages 66-69)  « des dictionnaires usuels en ligne » puis des « Thesaurus et cartographie sémantique » [70-71]. Ces pages sont toutes illustrées de pages-écran reproduites en dimensions correctes que les utilisateurs des Merriam-Webster, Trésor de la Langue Française et Grand Dictionnaire Terminologique reconnaîtront immédiatement. Le recours naturel à l’interrogation en série [69], illustrée avec l’emploi de Lexilogos est recommandé. La complémentarité entre thésaurus et cartographie sémantique est exposée pages 69 à 71. À partir de l’étude de cas constituée par « cronies, hacks, hucksters, shysters et college roommates », une démonstration visuellement très convaincante est exposée page 71, confirmée par les résultats croisés des trois lexiques utilisés dans l’Atlas Sémantique et le Merriam Webster. Les premières pages de « Lexiques en contexte » décrivent les diverses preuves possibles pour désambiguïser un terme, compte tenu du contexte où ce terme est rencontré : preuve par l’image, preuve par association, preuve par les chiffres sont successivement traitées, à chaque fois avec une étude de cas, assortie d’une illustration pour la première d’entre elles d'un Pygmy shrew.  Les sous-chapitres 4.2.2, 4.2.3. et 4.2.4. exposent ensuite rapidement le repérage des « différences culturelles et d’usage » |74-75] et le « suivi de l’évolution de la langue en temps réel » |76-77], permettant une analyse en temps réel des anachronismes, xénismes et néologismes, des lexiques émergents et les « corpus numériques » [78], avant de terminer ce chapitre sur les pistes d’exercices [79]. On peut aussi noter, dans la partie dédiée aux corpus numériques, un intéressant passage concernant la typologie des linguiciels [78]. À chaque sous-partie, une étude de cas vient apporter une traduction concrète de la problématique soulevée par l’auteur.

La « Traduction à partir du Net »  fait l’objet de l’intégralité du Chapitre 5. Là encore, si les étudiants ou l’utilisateur occasionnel de ces sites ou services sauront apprécier la concision, la structure adoptée par l’auteur, les tableaux et la page-écran reproduite page 86, le spécialistes pourront exprimer une légitime frustration. L’auteur fait tour à tour le point sur les offres de TA (Traduction Automatique) [82-83] et la traduction par textes parallèles [84-85] avant d’aborder les diverses techniques de TAO (Traduction Assistée par Ordinateur) à savoir :

-les divers logiciels |86-87]

-les tendances observables [87]

avant la nécessaire révision (sous-chapitre 5-4), cette dernière étant une intéressante étude de cas (traduction en français d’un texte en portugais).

 Le chapitre 6, « la veille documentaire »,  se dégage des travaux de traduction en donnant diverses recettes pour repérer à coup sûr les acteurs clefs d’un domaine, identifier et apprécier les RSS (really simple syndication ou rich site summary). Les pages 93 à  99 traitent ainsi successivement de la veille de presse et de l’utilisation à bon escient des portails de presse (une étude de cas sur le PVC se trouve p. 95). Une seconde étude de cas illustre également le passage sur la recherche de lettres d’information [97] et les fils RSS [98].

Le chapitre 7 traite plus en profondeur  des formes de bibliographies et d’archives en ligne. Les divers sous-chapitres sont illustrés d’une étude de cas dans laquelle sont reproduites des pages-écran ; ces captures, très claires, illustrent efficacement le propos de l’auteur, dont les conseils pour présenter une bibliographie de façon claire sont judicieux et immédiatement réutilisables par les lecteurs étudiants [106-107]. Les archives ouvertes et la consultation d’ouvrages dans le texte intégral intéressent sans doute un lectorat plus restreint mais l’auteur illustre une nouvelle fois sa démarche par des pages-écran bien commentées et C. Larsonneur renvoie même les lecteurs intéressés à la publication coordonnée par C. Aubry et J. Janik, publiée en 2005 aux éditions ADBS [110]. La délicate question des droits d’auteur est traitée en deux pages seulement [113-114]. L’auteur met le doigt sur les questions faisant débat (la durée des droits d’auteur, la difficulté à appliquer la loi, le téléchargement de fichiers, etc). Une courte étude de cas [113] montre toute l’ambiguïté entre droits d’auteur et copyright. Si quelques lignes ne suffisent évidemment pas à satisfaire un lecteur spécialiste de ces questions, on saisit cependant la difficulté à protéger les créations, comme la nécessaire prudence à exploiter des données dans des recherches qui pourraient être amenées à être publiées, sous forme papier ou numérique.

Avant les « coups de cœur » sur les ressources utilisables par diverses langues de l’Union Européenne, le dernier chapitre (la recherche collaborative) couvre les wikis (dont Wikipedia) et les portails et forums de décision. Les pages 117-125 sont elles aussi illustrées de pages-écran pertinentes. L’historique et surtout le mode d’emploi de Wikipedia [118-120] seront très appréciés par tous les étudiants et linguistes et pourront même faire découvrir quelques astuces ou affaires récentes incitant à la vigilance sur l’objectivité des informations et contributions compilées sur ce site. C. Larsonneur dévoile également, toujours avec une concision générant la frustration des spécialistes, les potentiels et les limites de la recherche collaborative, le recours aux forums, aux groupes et sites  dédiés [121-125].

Enfin, C. Larsonneur donne la parole à diverses collègues dans les six « coups de cœur », dont on ne retiendra ici que celui rédigé par Diane Marshall pour l’anglais. Celle-ci recommande une sélection de sept sites utiles dans les études de la langue anglaise et du monde anglophone :

-Askoxford.com [155] pour la richesse de ce site concernant le Global English mais aussi sur les emprunts réciproques entre diverses langues.

-Comme on pouvait s’y attendre, Cambridge Online [156] figure évidemment dans cette sélection, et D. Marshall indique également les rubriques de ce site permettant d’étudier la langue tout en y trouvant des actualités humoristiques.

-Worldwizard [158] et ses rubriques ‘Archive’ et ‘Resource’ complètent encore les sites-ressources pour les études anglaises.

-BBC.com étoffe ces deux sites de dictionnaires en ligne par l’offre culturelle disponible non seulement sur le mode de vie britannique mais aussi sur l’actualité du monde anglophone au sens large. D. Marshall donne des astuces pour naviguer intelligemment dans l’immensité de ce site [156], véritablement hypermédia.

-Lost in translation [157] est également conseillé pour qui aime les subtilités de la langue anglaise et découvrir avec humour les limites de la traduction automatique.

-USinfo [157] est le seul site nord-américain retenu dans cette sélection. Là encore, le descriptif sommaire est complété par des conseils venant guider les étudiants à la recherche de ressources fiables et actualisées sur la littérature américaine. Les rubriques ‘Topics’ et ‘Resource Tools’ sont justement signalées aux lecteurs.

-The Official Site for Australian Travel and Tourism [158] termine cette sélection pour la découverte pratique de l’Australie, de son climat, de ses habitants, etc.

En fin d’ouvrage, les « Boîtes à Outils » [161-174] proposent de nouvelles fiches d’évaluation concernant les sites web [162], le lexicologue numérique [163], l’index translationum |164] et la veille en édition et éducation [165], cette dernière fiche donnant une liste supplémentaire de six sites web pouvant compléter utilement les ressources déjà signalées et évaluées dans les pages précédentes.

Une bibliographie de deux pages, en fin d’ouvrage, référence deux douzaines de publications (en français et en anglais), traitant des ressources numériques en général, la recherche d’informations et les moteurs de recherche.

 

 

 

 

 

 

 

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